J’ai lu utilement le numéro double 531-532 (juillet-août 2024) du magazine français „Lire”. Commentaires critiques incontournables, conversations et entretiens remarquables avec des écrivains et des gens de culture, enquêtes sur des sujets d’actualité, comptes rendus de publications éditoriales récentes, livres proposés à la lecture cet été 2024, aspects de la vie littéraire en France, préliminaires à l’événement le plus important de chaque automne – Rentrée littéraire –, tout est distribué, avec science, dans les pages du mensuel parisien.
Peut-être que pour certains amateurs de lecture aérienne, l’information est trop dense. Dès la première couverture, les titres et l’iconographie se disputent l’espace, et notre œil est sollicité pour chaque recoin de celui-ci. Les nouveaux enseignants ont du mal à découvrir le nombre et la période couverte par l’édition actuelle. Mais le talent éditorial des Français a une tradition. Vous ne restez pas indifférents lorsque vous voyez, sur une telle couverture, les thèmes et les images attrayants, prometteurs dans le contenu et l’expression, développés dans les plus de 100 pages imprimées sur du papier de qualité.
Laëtitia Favro écrit sur les „Cahiers de vacances” d’enfants et d’adultes, vendus, au début de chaque été, en nombre impressionnant : 5 millions d’exemplaires. Le mot d’ordre de cette année est „Apprendre en s’amusant”. La France n’échappe pas à l’hommage rendu à la mode actuelle : le fun. Le „Cahier” de l’été 2024 est dédié aux amoureux de la langue française. Karine Dijoud propose d’enrichir le vocabulaire par des moyens amusants : charades (énigmes), rébus, grilles des mots cachés, etc.
Louis-Henri de la Rochefoucauld publie une interview – intéressante pour les journalistes d’aujourd’hui – avec Virginie Giraud, journaliste à Europe 1, excellente connaisseuse de l’histoire antique, familière de la pensée des Anciens et auteure de podcasts sur ce sujet. „L’écriture radiophonique doit être oralisée”, afin de dessiner des images mentales pour ceux qui écoutent, précise Virginie Giraud. Elle a réécrit, en 2020, „La vie des 12 Césars” par Suétone.
Une agréable surprise est fournie par „Lire Magazine” présentant les derniers volumes d’Edgar Morin, le sociologue, philosophe, publiciste qui a atteint l’âge de … 102 ans. Il est le patriarche des intellectuels français d’aujourd’hui, auteur de plus de 120 ouvrages avec des réflexions sur la culture, la nature humaine, la bureaucratie, la politique, l’éducation, l’écologie et … vieillesse. „Graines de sagacité” (Fayard) et „L’année a perdu son printemps”, (Denoël) sont les titres de 2024 des livres d’Edgar Morin. Le second est un roman sur „la résistance, l’amour et l’héroïsme”, écrit avec „l’ardeur et la spontanéité de la jeunesse”, comme le commente Jean-François Paillard, auteur du texte sur Edgar Morin. Nous vous rappelons que le critique d’art Dan Hăulică, ambassadeur de la Roumanie auprès de l’UNESCO, Paris, 1990-2002, a également écrit et parlé avec admiration de l’intellectuel français de longue date. Les deux personnalités, Edgar Morin et Dan Hăulică, se sont rencontrés et ont eu des dialogues de haut niveau dans la capitale française, à l’occasion de rencontres culturelles.
Très important pour les journalistes culturels, dans „Lire Magazine”, c’est le texte d’Olivier Cariguel sur la collection „Un été avec…”, un format demi-poches, à l’initiative des „Éditions Radio France” et des „Éditions des Equateurs”. Le premier volume „Un été avec Montaigne” est paru en 2013, signé par Antoine Compagnon, le professeur, le critique et historien de la littérature bien connu et traduit en Roumanie. D’autres écrivains célèbres de la collection „Un été avec…” sont : Homère, Victor Hugo, Marcel Proust, Charles Baudelaire, Paul Valéry. Le recueil génère la confrontation des lecteurs avec les grands esprits du patrimoine universel.
„L’été est la période où les Français lisent le plus, comme à Noël”, note Olivier Frébourg, et même des essais d’histoire et de philosophie, que l’on trouve dans les librairies ouvertes sur les plages, comme la „Librairie Lajarrige”, dans la station thermale „La Baule” – écrit Hubert Artus.
Le double numéro mentionné dans de „Lire Magazine” s’intéresse également aux feuilletons radiophoniques, donc au travail journalistique par la parole. Un professeur de français invite un romancier dans sa classe et projette sur un écran non pas des images, ni des films, mais des textes de l’écrivaine Marie Pourchet. C’est un roman d’amour et le silence dans la salle de classe devient incroyable. La parole écrite à l’écran et la voix de la radio reprennent leur puissance.
Mais combien d’enseignants font cela, nous demandons-nous.
„Les écrivains et la mer” est un autre chapitre attrayant de la revue parisienne „Lire” : Stevenson, London, Conrad étaient à la fois des navigateurs éprouvés et des écrivains talentueux. Vous pouvez y consulter le romancier et critique roumain Adrian G. Romila. Son récent roman, „Acasă, departe”, a été couronné par le prix 2023 de l’Union des Écrivains Roumains. Cela ne ferait pas de mal de le traduire en français.
„La littérature et les faits divers” est le titre du dossier hébergé par „Lire Magazine”. Les affaires, les crimes, la violence dans la vie d’une époque historique ont nourri la littérature en abondance. „Le Comte de Monte-Cristo”, pour ne donner qu’un exemple parmi les centaines qui existent, est connu de tout amateur de littérature. Et Alexandre Dumas est aussi parti d’un fait divers.
La publication française se préoccupe intensément de la lecture de la nouvelle génération. „Que lisent exactement les jeunes en 2024 ?”. Eh bien, l’enquête nous donne un verdict pas vraiment heureux. Les jeunes Français sont, comme ceux d’autres pays, plus attirés par les écrans des ordinateurs. Et pourtant, en France, une croissance sans précédent est enregistrée par le „new romance”, la nouvelle „littérature romance” destinée aux adolescents. Morgane Moncomble, 28 ans, publie depuis 2017 la série „Seasons”, qui s’est vendue à des centaines de milliers d’exemplaires. Le personnage masculin est, dans les romans de cette autrice, un danger, un vendeur d’armes, un voleur, un représentant de la mafia, un homme violent, qui intimide, kidnappe et même torture son partenaire de vie. Ce serait le portrait-robot des romans lus à bout de souffle par les adolescentes et les jeunes femmes en France aujourd’hui.
De telles simplifications et falsifications nous semblent être un dérapage „sans précédent”. Aucun commentaire !
Nous voudrions plutôt nous concentrer davantage sur le texte signé par le célèbre romancier Éric-Emmanuel Schmitt : „Simplicité contre simplisme”. Si le romancier Schmitt est, peut-être, moins apprécié, ce qu’il dit dans l’article de LIRE Magazine attire notre attention : la multitude d’adjectifs (épithètes ou superlatifs absolus – m.n.), la surcharge de phrases, la verve sautillante signifie la démonstration juvénile, voire infantile disons-nous, d’un apprenti qui veut attirer l’attention sur lui-même, pas sur ce qu’il dit.
Enfin, pour le grand événement de l’automne – „Rentrée littéraire”, on retrouve, parmi les noms proposés en avant-première, Amélie Nothomb, Kamel Daoud, Aurélien Bellanger, Gaël Faye, Mélissa Da Costa.
Les prochains numéros de „Lire Magazine” comprendront, sans aucun doute, des pages sur les „choisis” des prix littéraires de cet automne.Si vous achetez la publication parisienne imprimée, dont nous n’avons présenté que quelques notes de lecture, nous vous invitons à la lire dans son intégralité. Ça vaut la peine !